Volume 5 Numéro 5 - 20 avril 2006

Le bulletin est aussi disponible dans sa version originale en format PDF   Télécharger | 286 Kb


SOMMAIRE

Enjeux-ÉNERGIE
> L’Ontario à l’heure des grands choix
> Les Américains intrigués par le succès de l’éthanol brésilien
> FEM : Les États-Unis coupent de moitié leur financement
> Énergie solaire : le New Jersey en tête de file
> Des pays européens rappelés à l’ordre par Bruxelles
> Wal-Mart annonce un plan ambitieux


Enjeux-CLIMAT
> Focus : Ottawa sabre dans les programmes de Kyoto
> Les scientifiques canadiens interpellent Harper
> La vulnérabilité et l’adaptation du Canada : le secteur privé sonne l’alarme
> Le Maryland joindra les rangs du RGGI


Enjeux-ÉNERGIE (suite...)
> Vers une production plus rentable du bioéthanol


NOUVELLE du Centre

Le Centre Hélios participe au colloque du CEDRIE

Philip Raphals, directeur général, et Luis Salgado, responsable de projets en changements climatiques (CC), participeront à titre de conférenciers le 28 avril à un colloque international organisé par le CEDRIE, Centre de Développement de la Recherche Internationale en Environnement de l’Université de Montréal.

Intitulé Le Protocole de Kyoto : quel bilan un an après ?, le colloque a lieu à l’Université de Montréal et rassemblera une brochette d’experts et de personnalités actives dans le domaine des CC au Canada et en Europe.

M. Raphals présentera les récents développements sur l’Application conjointe, un des trois mécanismes de flexibilité du Protocole, et M. Salgado discutera du rôle des pays en développement comme le Pérou dans la lutte aux CC.

Le Colloque est gratuit. Pour plus d’information : celine.negre@umontreal.ca http://www.cerium.ca/article2230.htm


À PROPOS du bulletin

Le bulletin Enjeux-ÉNERGIE est publié par le Centre Hélios, une société indépendante de recherches et d'expertise-conseil en énergie.

Les travaux du Centre sont axés sur l'analyse et la conception de stratégies, de politiques, d'approches réglementaires et de mesures économiques favorisant le développement durable et équilibré du secteur énergétique.

Les clients du Centre incluent les gouvernements, les organismes d'intérêt public et les producteurs et distributeurs d'énergie, parmi d'autres. Le Centre Hélios est un organisme à statut charitable reconnu par Revenu Canada et Revenu Québec. Tout don versé au Centre est déductible pour fins d'impôts.

- Parution toutes les trois semaines -

Rédaction :
Alexis BEAUCHAMP, Sophie GEFFROY, Philip RAPHALS, Maxime RIVET

Production :
Sophie GEFFROY


REMERCIEMENTS

Nous tenons à remercier les partenaires suivants pour leur appui à cette publication :


 


 

Politiques et plans
L’Ontario à l’heure des grands choix

Il y a actuellement de l’électricité dans l’air en Ontario. La province doit bientôt annoncer ses intentions sur la fermeture des centrales au charbon et la construction possible de nouvelles centrales nucléaires. Ces développements surviennent alors que la province a récemment révélé de nouvelles mesures pour encourager les énergies renouvelables [vol. 5 no 4, p. 1] et une hausse allant jusqu’à 16 % des tarifs résidentiels d’électricité.

Le gouvernement libéral a promis lors des élections en 2003 de condamner d’ici 2007 les centrales au charbon de la province, qui fournissent 20 % (29 TWh) de son électricité. Il est dorénavant certain qu’il ne parviendra pas à respecter cet engagement. Le gouvernement devrait d’ailleurs communiquer très bientôt une nouvelle échéance pour atteindre cet objectif, dans le cadre du dévoilement d’une politique énergétique à long terme où le nucléaire pourrait bien jouer un rôle central.

Là réside la plus importante recommandation de l’Ontario Power Authority (OPA), chargée d’assurer la planification à long terme de la production d’électricité en Ontario, dans son rapport de décembre 2005. Elle souligne que le nucléaire représente une « excellente alternative à la volatilité des prix et à l’incertitude entourant l’approvisionnement, qui sont les principaux désavantages d’une production électrique au gaz naturel ». Elle recommande qu’entre 63 et 83 % des 15 000 MW de capacité supplémentaire, nécessaires selon elle pour répondre à la demande d’ici 2025, devraient provenir du nucléaire. Le premier ministre Mc Guinty a d’ailleurs affirmé le 20 avril qu’il considère la filière nucléaire comme la meilleure solution aux besoins énergétiques ontariens.

Selon l’Institut Pembina, centre de recherche indépendant en environnement, l’OPAa largement surestimé la croissance de la demande en électricité pour les 20 prochaines années de même que les coûts associés au gaz naturel. Par contre, elle a sous-évalué les améliorations possibles en efficacité énergétique, le développement des énergies renouvelables et les coûts économiques et environnementaux de l’option nucléaire.

L’Ontario Clean Air Alliance (OCAA) a donc demandé à l’OPA de refaire ses calculs après avoir révisé quelques-unes des hypothèses de départ. En tenant notamment compte des coûts en capital de la nouvelle génération de réacteurs nucléaires CANDU 6 et de leur performance en 2005, l’OPA obtient finalement le chiffre de 20,9 ¢/kWh, par rapport à 7,0 ¢/kWh pour les centrales au gaz naturel à cycle combiné et 8,6 ¢/kWh pour les projets hydroélectriques et éoliens contractés en 2005.

L’Institut Pembina déplore aussi le fait que l’OPA adhère à la philiosophie d’augmenter l’offre plutôt que de viser un fléchissement de la demande. Il appuie par ailleurs l’OCAA en affirmant que l’écart potentiel entre l’offre et la demande en 2025 sera entre 6000 et 9500 MW, et non les 15 000 annoncés par l’OPA.

Le syndicat des employés de l’énergie en Ontario, Power Workers Union, s’est rallié aux grands consommateurs représentés par l’Association of Major Power Consumers of Ontario (AMPCO) pour dénoncer l’intention du gouvernement de fermer les centrales au charbon, mais aussi le rapport de l’OPA. Plutôt que de se détourner du charbon, l’AMPCO favorise la construction de nouvelles centrales au charbon « propre » d’ici 2011. Ces installations permettraient de réduire considérablement les émissions grâce à des filtres et nettoyeurs (scrubbers), mais surtout par la capture et la séquestration du carbone. Plusieurs observateurs dénoncent toutefois l’épithète « propre » parce qu’il ne tient pas compte des impacts en amont, notamment lors de l’extraction du charbon, et soulignent que la séquestration du CO2 sert parfois à extraire du pétrole ou du gaz naturel lorsqu’il est injecté dans des puits plus vieux.

Selon l’AMPCO ces centrales permettraient cependant à la fois de répondre aux besoins de l’Ontario, et d’ouvrir la porte à l’exportation d’électricité.

Cette proposition est toutefois assurée de rencontrer une forte opposition en Ontario, où les citoyens sont très favorables à la fermeture des centrales actuelles.

> Pour en savoir plus
[OPA Supply Mix Advice]
[Rapport de Pembina]
[Ontario Clean Air Alliance]
http://www.ampco.org/>[AMPCO]
[article Globe and Mail]

Carburants
Les Américains intrigués par le succès de l’éthanol brésilien

Le discours sur l’état de l’Union du président George W. Bush, le 31 janvier dernier, a déclenché un important battage médiatique autour de l’éthanol. Le cas brésilien a particulièrement retenu l’attention, entre autres à cause des intentions de plus en plus explicites de Brasilia de développer le commerce international de l’éthanol, notamment en visant le marché américain. Le Brésil espère devenir autosuffisant énergétiquement avant la fin de l’année.

Si l’objectif de la Maison Blanche est de produire de l’éthanol cellulosique concurrentiel d’ici six ans, le Brésil, lui, a eu besoin de 30 ans pour y arriver avec de l’éthanol produit à base de canne à sucre. Ce pays s’accapare aujourd’hui 53 % du commerce mondial de l’éthanol, et prévoit doubler le volume exporté pour 2010.

Les conducteurs brésiliens consomment 83 % de la production nationale d’éthanol. L’essor fulgurant de l’usage de ce carburant est dû avant tout à l’apparition, en 2003, des véhicules « flex-fuel », équipés d’un système permettant d’utiliser n’importe quel carburant et donc de faire le plein en fonction du prix des divers carburants (éthanol pur, 85 % d’éthanol, essence…). Le pays dispose de 29 000 stations service offrant de l’éthanol contre 619 aux États-Unis.

Le Brésil exporte son éthanol principalement au Venezuela, en Inde et en Corée du Sud, mais aussi aux États-Unis. Ces derniers imposent toutefois une taxe de 54 ¢ par gallon d’éthanol afin d’encourager la consommation d’éthanol produit aux États-Unis, dont la matière première est le maïs. Selon le Center for Sugarcane Technology, pour chaque unité d’énergie nécessaire afin d’extraire l’éthanol de la canne à sucre, on crée 8,3 fois plus d’énergie, contre un maximum de 1,3 fois plus à partir du maïs [EÉ, vol. 5 no 3, p. 3].

Malgré les obstacles auxquels fait face cette industrie naissante, le retrait de l’additif MTBE dans l’essence aux États-Unis permettra cette année d’augmenter les importations d’éthanol, les producteurs américains ne pouvant suffire à la demande. De plus, le Japon étudie actuellement la possibilité d’instaurer une norme obligatoire de 3 % d’éthanol dans l’essence, ce qui triplerait immédiatement la demande sur le marché international.

Ces opportunités expliquent pourquoi Sun Microsystems, Bill Gates et Virgin Group prennent le pari de s’éloigner de leurs domaines d’activités pour se positionner dans ce secteur.

Si l’éthanol ne représente pour l’instant que 3 % des ventes de carburants aux États-Unis, cinq millions d’automobiles sont déjà équipées du système flex-fuel, qui ne coûte que 100 $ US en achat et installation. Le manufacturier automobile GM en a d’ailleurs fait le centre de sa nouvelle campagne de relations publiques.

> Pour en savoir plus
[article New York Times]
[article US Today]
[article New York Times]

Politiques et plans
FEM : Les États-Unis coupent de moitié leur financement

L’administration Bush a annoncé à la fin du mois de mars des compressions de 224 millions $ dans son financement du Fonds pour l’environnement mondial (FEM), soit une réduction de 50 %. Cette nouvelle est survenue malgré la réaffirmation par le président Bush de l’engagement des États-Unis envers l’aide au développement et le transfert des technologies propres lors du sommet du G8 à Gleneagles.

Le FEM, une initiative qui regroupe la Banque mondiale et les programmes des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) et pour le développement (PNUD), offre un soutien crucial aux pays en développement dans la réalisation de projets de développement durable, de lutte contre les changements climatiques et de gestion des ressources naturelles. Depuis 15 ans, le FEM a distribué plus de 7,5 G $US et amassé 16 G $US en co-financement pour la réalisation de plus de 1500 projets dans 140 pays en développement et économies en transition. En 2002, 32 pays donateurs dont les États-Unis se sont engagés à verser 3 G $US pour regarnir le Fonds.

Mario Ramos, spécialiste en biodiversité au FEM, craint que d’autres pays suivent l’exemple des États-Unis, ce qui limiterait notamment la mise en œuvre de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), mais aussi celle sur la diversité biologique. La contribution des États-Unis au FEM étant prépondérante (21 %), des compressions supplémentaires pourraient sérieusement miner l’avenir du Fonds.

Malgré une réforme réussie du FEM effectuée selon le plan des États-Unis il y a environ un an, l’administration Bush a fait savoir qu’elle réduirait sa contribution, prétextant que des amendements supplémentaires doivent être effectués pour améliorer son efficacité et sa transparence. Notons par ailleurs que le FEM est le seul mécanisme financier international lié aux changements climatiques auquel les États-Unis contribuent.

Frank E. Loy, ancien sous-secrétaire d’État et négociateur en chef en matière de changements climatiques pour l’administration Clinton, a pointé du doigt le manque de leadership de l’Europe et particulièrement des dirigeants du Royaume-Uni et de l’Allemagne dans cette affaire. Selon Loy, l’Europe est restée muette et passive depuis quelques mois pour éviter toute confrontation avec les États-Unis, malgré les plans avoués de la Maison Blanche dans le but de réduire la participation américaine au FEM.

> Pour en savoir plus
[lettre]
[article]

Politiques et plans
Énergie solaire : le New Jersey en tête de file

L’État américain du New Jersey produira 20 % de son électricité en 2020 à partir de sources renouvelables, dont 2 % qui doit provenir de l’énergie solaire. Le New Jersey Board of Public Utilities a révisé récemment les normes de son Renewable Portfolio Standard (RPS), qui réglemente la part minimale de la production électrique devant provenir de sources renouvelables.

Environ 1500 MW d’électricité photovoltaïque seront générés grâce à cette mesure, faisant du New Jersey le plus important producteur d’énergie solaire per capita aux États-Unis. La capacité totale d’électricité photovoltaïque prévue pour 2008 n’est actuellement que de 90 MW. La part minimale des énergies renouvelables augmentera annuellement à partir de 2008.

C’est la troisième fois, depuis l’instauration du RPS en 1999, que l’État d’environ 9 millions de personnes révise à la hausse les normes de ce cadre réglementaire.

> Pour en savoir plus
[communiqué]
[article]

Énergies renouvelables
Des pays européens rappelés à l’ordre par Bruxelles

La Commission européenne a entamé des démarches judiciaires auprès de huit de ses pays membres afin de les forcer à respecter ses normes sur les énergies renouvelables. L’Italie, la Grande-Bretagne, la Pologne et la République Tchèque n’ont pas fait état de leurs progrès dans l’utilisation des sources d’énergies renouvelables, tandis que l’Italie, la Latvie, le Chypre, la Grèce et l’Irlande ont adopté des mesures insuffisantes pour assurer la promotion des énergies renouvelables. Ces pays ont reçu des « lettres formelles de notification », première étape des démarches légales entreprises par la Commission.

La loi passée par Bruxelles précise que les pays membres de l’UE devaient, avant octobre 2003, assurer la transition des directives communautaires vers une législation nationale afin, notamment, de mettre en place certaines mesures de libéralisation du marché, comme un accès équitable au réseau électrique et une garantie d’origine de la source d’électricité. Ces dispositions permettront une meilleure intégration des énergies renouvelables au réseau, tandis que d’autres politiques doivent explicitement favoriser leur développement.

L’UE a une cible de 21 % d’énergie renouvelable sur la totalité de l’électricité consommée en Europe d’ici 2010. Cette proportion est actuellement de 14 %.

Des démarches semblables ont été entreprises pour les normes de biocarburants, où les pays de l’UE accusent un retard important. Moins de 1 % de l’essence consommée en Europe en 2004 était du biocarburant, même si l’objectif de l’UE est de 2 % d’ici 2005 et 5,75 % d’ici 2010. Malgré ces difficultés d’application, la Commission européenne considère actuellement la possibilité d’hausser ces normes.

> Pour en savoir plus
[article]
[article]

Initiatives
Wal-Mart annonce un plan ambitieux

La Commission européenne a entamé des démarches judiciaires auprès de huit de ses pays membres afin de les forcer à respecter ses normes sur les énergies renouvelables. L’Italie, la Grande-Bretagne, la Pologne et la République Tchèque n’ont pas fait état de leurs progrès dans l’utilisation des sources d’énergies renouvelables, tandis que l’Italie, la Latvie, le Chypre, la Grèce et l’Irlande ont adopté des mesures insuffisantes pour assurer la promotion des énergies renouvelables. Ces pays ont reçu des « lettres formelles de notification », première étape des démarches légales entreprises par la Commission.

La loi passée par Bruxelles précise que les pays membres de l’UE devaient, avant octobre 2003, assurer la transition des directives communautaires vers une législation nationale afin, notamment, de mettre en place certaines mesures de libéralisation du marché, comme un accès équitable au réseau électrique et une garantie d’origine de la source d’électricité. Ces dispositions permettront une meilleure intégration des énergies renouvelables au réseau, tandis que d’autres politiques doivent explicitement favoriser leur développement.

L’UE a une cible de 21 % d’énergie renouvelable sur la totalité de l’électricité consommée en Europe d’ici 2010. Cette proportion est actuellement de 14 %.

Des démarches semblables ont été entreprises pour les normes de biocarburants, où les pays de l’UE accusent un retard important. Moins de 1 % de l’essence consommée en Europe en 2004 était du biocarburant, même si l’objectif de l’UE est de 2 % d’ici 2005 et 5,75 % d’ici 2010. Malgré ces difficultés d’application, la Commission européenne considère actuellement la possibilité d’hausser ces normes.

> Pour en savoir plus
[article]
[communiqué Walmart]



Enjeux-CLIMAT
Focus : Ottawa sabre dans les programmes de Kyoto

Une translation du pouvoir au sein du gouvernement fédéral semble se confirmer dans le dossier des changements climatiques alors que c’est le ministre des Ressources naturelles qui a annoncé d’importantes compressions dans les programmes sur les changements climatiques (CC). Historiquement, cette question a toujours nécessité une collaboration entre les ministères de l’Environnement et des Ressources naturelles, mais depuis quelques années, Environnement Canada assurait la gouverne en la matière.

Gary Lunn a confirmé la semaine dernière que 80 % des fonds d’Environnement Canada dédiés aux programmes en CC seront réduits, et que 40 % de l’enveloppe budgétaire fédérale consacrée à ce problème subiront le même sort. Plusieurs programmes, dont le Défi d’une tonne, sont interrompus immédiatement tandis que d’autres, comme celui de démonstration en transport urbain de Transports Canada, ne seront pas renouvelés lorsque leur financement arrivera à échéance.

Le ministre Lunn précise que ce remaniement s’applique à des programmes « qui ont rempli leur mission ou pour lesquels une nouvelle démarche est nécessaire » : 15 programmes seront éliminés en tout. Aucun détail n’a été dévoilé sur d’éventuelles mesures de remplacement, la ministre de l’Environnement, Rona Ambrose, restant muette sur le sujet. Depuis son entrée en fonction, celle-ci met plutôt l’accent sur la pollution atmosphérique, sujet dans lequel elle inscrit la problématique des CC, dans totues ses allocutions officielles.

Selon M. Lunn, la faillite des initiatives abandonnées est visible par la croissance des émissions canadiennes de GES qui s’élèvent à environ 28 % au-delà du seuil de 1990. « La nouvelle administration du premier ministre Stephen Harper est déterminée à mettre un terme à [cette] vertigineuse hausse (...) des dix dernières années. Pour ce faire, il nous faut une nouvelle manière d’aborder les CC, une stratégie différente, à la fois efficace et réaliste pour le Canada ».

Cette annonce a ébranlé le mouvement environnemental canadien qui dénonce à l’unisson ces coupures massives. Il souligne que le plan vert des libéraux était le fruit de consultations et de négociations fastidieuses avec les provinces, l’industrie et la société civile.

Hugo Séguin, coordonnateur du Centre québécois d’actions sur les changements climatiques, parle de « coupures à la tronçonneuse », tout en soulignant qu’« encourager les Canadiens à réduire leur demande d’énergie est également essentiel si nous voulons réduire nos émissions de GES ».

David Coon, président de Réseau Action Climat (Canada), une coalition internationale d’ONG, réfute l’argument principal cité par le ministre Lunn : « s’il y a des programmes inefficaces, ils doivent être améliorés ou remplacés immédiatement par des programmes ou une réglementation plus efficaces ». Le responsable du dossier climatique chez Greenpeace Canada, Steven Guilbeault, ajoute qu’il serait profitable pour le pays d’investir dans des programmes internationaux de réduction des GES : « pendant que nous travaillons à réduire nos émissions de GES au Canada, nous pouvons soutenir des projets utiles qui réduisent les émissions partout sur la planète et qui nous aident aussi à atteindre nos objectifs. Le gouvernement se doit d’utiliser cette approche qui lui permettra de faire d’une pierre deux coups ».

Par ailleurs, la Presse canadienne a obtenu des documents internes du ministère fédéral des Finances indiquant que la principale mesure des Conservateurs pour réduire les émissions de GES – soit la possibilité de rendre les cartes mensuelles de transport collectif déductibles d’impôt – aurait un impact très faible sur les émissions de GES. Les mémos précisent que cette initiative, dont le coût serait entre 1 et 2 G$, permettrait d’augmenter l’utilisation du transport en commun de seulement 5 à 7 %. Chaque tonne de GES évitée coûterait donc 2000 $, contre 20 à 200 $ la tonne pour le plan vert de Stéphane Dion dévoilé en avril 2005.

> Pour en savoir plus
[communiqué Ressources naturelles Canada]
[communiqué RAC-Canada]
[article The Gazette]
[article CBC]

Enjeux-CLIMAT
Les scientifiques canadiens interpellent Harper

L’élite des experts en changements climatiques, y compris plusieurs scientifiques travaillant pour le gouvernement fédéral, fait front commun dans une lettre ouverte au Premier ministre afin de le convaincre de « formuler une stratégie nationale efficace pour relever les nombreux défis climatiques importants qui toucheront aussi bien le Canada que le reste du monde, dans un proche avenir ».

Les 90 spécialistes « souscrivent à l’évaluation » du Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC), qui a également reçu l’aval des académies nationales des sciences des pays du G8 et de celles de la Chine, de l’Inde et du Brésil.

Cette action des scientifiques canadiens est une réponse directe à la lettre ouverte signée par 60 sceptiques de la science des changements climatiques, qui demandaient récemment au gouvernement fédéral de reconsidérer « les fondements scientifiques » de ses programmes dans le dossier. Plusieurs pseudo experts associés aux lobbys des énergies fossiles aux États-Unis, dont Pat Michaels, Fred Singer et Sallie Baliunas, ont signé la missive.

> Pour en savoir plus
[lettre des 90 experts canadiens]
[lettre des 60 experts sceptiques]

Enjeux-CLIMAT
La vulnérabilité et l’adaptation du Canada : le secteur privé sonne l’alarme

Le Conference Board du Canada affirme que les changements climatiques sont « inévitables » et que le Canada est très mal préparé à faire face à leurs impacts : «Nous n’avons actuellement aucune stratégie. Indépendamment de ce que nous faisons pour réduire nos émissions de GES, le climat va changer. Nous savons que ces changements ont présentement lieu. Nous ne sommes tout simplement pas prêts », affirme Gilles Rhéaume du Conference Board.

Cette organisation indépendante est réputée comme conservatrice et compte, sur son conseil d’administration, le gratin des dirigeants des grandes entreprises canadiennes (TransAlta, Hydro-Québec, 3M, Unilever, Bell, DaimlerChrysler, CGI, Procter & Gamble…). Les avertissements très clairs contenus dans le rapport Adapting to Climate Change: Is Canada Ready? contrastent avec les propos antérieurs du Conference Board sur les changements climatiques, axés sur l’incertitude entourant le plan canadien pour atteindre ses objectifs de Kyoto. Le Conference Board rejoint les conclusions du rapport de la Table ronde nationale sur l’économie et l’environnement (TRNEE), présenté peu avant la Conférence de Montréal. Les membres de la TRNEE, nommés par le Premier ministre Paul Martin, affirmaient alors que le Canada était très vulnérable aux impacts néfastes des changements climatiques et recommandaient au gouvernement d’«intensifier ses efforts d’adaptation aux effets actuels et prévus du changement climatique, même s’il n’est pas bien préparé à l’heure actuelle pour ce faire ».

Les recommandations de la TRNEE coïncidaient avec la publication d’une lettre signée par les dirigeants canadiens de Bombardier, Alcan, Desjardins, Shell et Home Depot, notamment, qui réclamaient du gouvernement de l’époque une action plus ambitieuse contre les changements climatiques.

Plusieurs leaders du secteur privé s’allient de manière croissante aux écologistes pour demander des signaux clairs en ce qui concerne la politique canadienne sur les changements climatiques et incitent Ottawa à élaborer un plan à plus long terme que 2012 pour assurer un cadre plus stable pour les investissements, mais également pour contrer la vulnérabilité du Canada face aux impacts des changements climatiques.

> Pour en savoir plus
[Conference Board]
[TRNEE]

Enjeux-CLIMAT
Le Maryland joindra les rangs du RGGI

Le gouverneur du Maryland, Robert L. Ehrlich, a finalement entériné au début du mois d’avril, sous la pression publique, le Healthy Air Act. Il s’agit de la nouvelle loi de l’État en matière de pollution atmosphérique. Maintenant muni des normes les plus élevées aux États-Unis en matière d’émissions polluantes, le Maryland deviendra du même coup le dixième État membre du Regional Greenhouse Gas Initiative (RGGI).

Le Maryland Healthy Air Act régit les émissions de SO2, NOx, mercure et CO2, les quatre plus importants polluants en provenance du secteur de l’énergie. La nouvelle loi obligera entre autres les propriétaires de sept centrales thermiques très anciennes et très polluantes à moderniser enfin leurs équipements. Ces dernières, dont plusieurs sont âgées de près de 60 ans, avaient été exemptées d’obligations lors de la mise en ouvre du Clean Air Act en 1970.

Afin de s’attaquer aux émissions de CO2 et à leurs effets sur le climat, la nouvelle loi prévoit aussi l’adhésion du Maryland au RGGI. Ce programme, dont sont déjà membres plusieurs États du nord-est des États-Unis (Connecticut, Delaware, Maine, Massachusetts, New Hampshire, New Jersey, New York, Rhode Island et Vermont), engagera notamment le Maryland à réduire de 10 % par rapport à la valeur de 2005 les émissions de GES de son secteur de production électrique d’ici 2019 [Voir EÉ vol 5 no 5, p.6].

Par ailleurs, les règles de mise en œuvre du RGGI sont actuellement soumises à un processus de consultations publiques. La version préliminaire du document à été rendue publique le 23 mars dernier et les commentaires seront recueillis jusqu’au 22 mai.

> Pour en savoir plus
[article News Wire]
[fiche]
[site]

Biocarburants
Vers une production plus rentable du bioéthanol

Une méthode de prétraitement des matières ligneuses pour en extraire le sucre pourrait grandement réduire les coûts de prétraitement de la production du bioéthanol.

Au lieu d’utiliser des produits chimiques hautement corrosifs, une pression élevée et des températures variant entre 150 et 250 oC, le professeur Zhang de l’Université Virginia Tech procède avec une pression atmosphérique et une température de 50 oC grâce à un solvant organique très volatile.

La matière première est alors fractionnée en quatre produits différents dont la cellulose amorphe qui, par hydrolyse, permet d’obtenir du sucre. Or, le taux d’hydrolyse de la cellulose amorphe obtenue par cette méthode est plus élevé qu’avec d’autres méthodes de prétraitement. De plus, on obtient une plus grande quantité de sucre et en utilisant moins d’enzymes. Ces dernières sont en partie responsables du coût élevé de la production de bioéthanol.

La réduction des coûts résulterait donc à la fois d’une augmentation de la production du biocarburant, d’une diminution des coûts de production, mais aussi d’un investissement initial moins élevé à cause de l’intégration de technologies matures et de bioraffineries plus petites.

> Pour en savoir plus
[article]
[publication dans PNAS en pdf]